lundi 12 juin 2017

Saint Antoine de Padoue et les poissons


Saint Antoine de Padoue était compagnon de saint François d’Assise. Il allait comme lui par les chemins, prêchant aux hommes la bonté de Dieu et les invitant à être bons comme Lui. Mais les hommes ne l’écoutaient guère.
Le saint leur disait :
« Ne soyez pas gourmands ! »
Mais eux continuaient à se rendre malades à force de trop manger.
« Ne soyez pas paresseux ! »
Mais les hommes préféraient dormir ou bavarder plutôt que de travailler.
« Soyez charitables. Donnez aux pauvres ! »
Mais les hommes préféraient tout garder pour eux-mêmes, en égoïstes.
Et saint Antoine devenait très triste.
Il s’approcha un jour de la mer, à l’embouchure d’un fleuve, et, sur un banc de sable, entre le fleuve et la mer, il se mit à parler aux poissons :
« Écoutez la parole de Dieu, poissons de la mer et vous, poissons du fleuve, puisque les hommes méchants ne veulent pas l’entendre. »

Alors on vit accourir des extrémités du monde tous les poissons des mers, des océans et des fleuves, venus pour écouter saint Antoine.
Les gros, comme les thons, les saumons, les morues, les uns gris, les autres bruns, les autres brillants comme de l’argent, arrivèrent, rangés comme une armée de soldats, et se tinrent en arrière, là où l’eau était plus profonde. Les moyens, comme les dorades rose et or, les maquereaux bleu et noir, nacrés de rose, les carpes et les tanches, se placèrent en avant ; quant aux tout petits, timides et un peu effrayés, ils se blottirent tranquillement sous les nageoires des gros.

Alors, tous les poissons, en bel ordre et sans se battre ou chercher à s’entre-dévorer, comme ils en ont l’habitude, ne bougèrent plus et tinrent leur tête un peu soulevée hors de l’eau comme pour mieux entendre.
Saint Antoine commença à prêcher :
« Mes frères les poissons, vous devez louer Dieu et le remercier de toutes vos forces. Il vous a donné pour vivre le beau domaine de l’eau claire et transparente, salée ou douce, selon vos goûts, et une nourriture facile et abondante. Il vous a donné des nageoires pour courir où il vous plaît.
Quand le déluge arriva, quand tous les autres animaux moururent — à l’exception de ceux que Noé avait recueillis dans son arche —, Dieu eut pitié de vous seuls, mes frères les poissons, et vos ancêtres purent alors parcourir la terre entière.

À cause de toutes ces choses, vous devez louer et bénir Dieu qui vous a comblés de ses bienfaits. »
À ces paroles, les poissons commencèrent à ouvrir la bouche et à incliner la tête, louant Dieu à leur manière et du mieux qu’ils pouvaient. Saint Antoine continua à dire aux poissons pourquoi ils devaient remercier le Seigneur, et plus il prêchait, plus le nombre des poissons augmentait ; chacun, cependant, restait à la place qu’il avait choisie.

Quand les hommes virent le saint parler, seul devant la mer, ils se demandèrent ce qu’il faisait là, et tous, curieux, vinrent voir. Quel étonnement lorsqu’ils aperçurent les poissons de la mer et des fleuves, rangés et immobiles, écoutant le sermon du moine qu’ils n’avaient pas écouté eux-mêmes.
Celui-ci termina et bénit les poissons : tous baissèrent la tête pour recevoir la bénédiction, puis ils disparurent dans un grand clapotis d’eau.
Les hommes furent si émerveillés par ce miracle et si vexés de voir les animaux plus raisonnables qu’eux qu’ils se décidèrent enfin à écouter la parole de Dieu.
Ils ne devinrent pas tous bons, travailleurs et charitables, mais ils firent de sérieux efforts et saint Antoine loua Dieu dans son cœur.

(D’après M.-H. Pauly.)

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