Il était une fois une marguerite et une pâquerette
qui s’aimaient tendrement. Elles étaient nées non loin l’une de l’autre. La
berge d’un canal avait été aménagée en promenade. Tout au long de la rive, des
saules pleureurs laissaient d’un côté nonchalamment tremper dans l’eau paisible
le bout de leurs branches, de l’autre apportaient ombre et fraîcheur aux
promeneurs tranquilles marchant sur un chemin de fins gravillons. De l’autre
côté de ce chemin, s’étendait une pelouse bien tondue sur laquelle les enfants
faisaient mille galipettes, jouaient au ballon ou essayaient d’attraper des
sauterelles. C’est là qu’était née la pâquerette. Au-delà de la pelouse, et à
perte de vue, un pré laissait lascivement ses hautes herbes se balancer au
rythme des vents. C’est là qu’était née la marguerite. Très jeunes déjà, elles
s’étaient remarquées entre toutes et se faisaient des petits signes de leurs
pétales. Leur amour grandissait de jour en jour, mais voilà, un mètre les
séparait, c’était plus que trop pour elles.
– Tu es si loin, je ne peux même pas sentir ton
parfum, j’aurais tant aimé que nous poussions l’une contre l’autre, disait la
marguerite. Alors la pâquerette, au prix de mille efforts, extirpant du sol,
une à une ses racines pour les replanter un peu plus loin, se déplaça-t-elle
jusqu’aux pieds de sa promise.
– Tu es si petite, je te distingue à peine parmi
toutes ces herbes, j’aurais tant aimé appuyer ma fleur tout au bord de la
tienne, disait la marguerite. Alors la pâquerette, au prix de mille
souffrances, allongeant sa tige, rejoignit-elle sa bien-aimée.
– Ta corolle est si petite comparée à la mienne, j’ai si peur en l’étreignant d’en froisser le moindre pétale, disait la marguerite. Alors la pâquerette, au prix de mille tortures, s’étala-t-elle au plus large qu’elle pût pour ressembler à l’élue de son cœur. – Nous allons enfin pouvoir partager notre vie comme nous l’avons rêvé depuis notre plus jeune âge, disait la marguerite en se serrant contre son amie. Mais la pâquerette ne pût rien répondre, épuisée de tant de peine, elle n’eût plus que la force de se laisser faner, laissant seule à jamais celle pour qui elle avait tout donné. Que t’en semble, ami, viens- tu de lire une histoire d’amour ? Tu ne crois pas, et tu as raison; si tu y avais cru, tu aurais eu raison aussi. L’amour, c’est donner le meilleur de ce que l’on a, de ce que l’on est, de ce que l’on peut, sans rien demander en échange. L’amour, c’est accueillir l’autre tel qu’il est, sans rien exiger de lui de peur de l’obliger à faire ce qu’il ne pourrait pas, de peur de le faire devenir quelqu’un qu’il n’est pas, de peur de lui prendre quelque chose qu’il n’a pas : de peur de l’épuiser. L’amour, c’est recevoir simplement ce que l’autre est capable de donner, même si ce don ne nous satisfait pas entièrement car, ce qu’il a donné est ce qu’il avait de plus beau. L’amour, c’est savoir que demain, par amour, l’autre donnera encore et encore, offrant le meilleur de ce que Dieu a mis en lui, et cela, sans rien demander en échange. Antoine LANG;
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