samedi 11 novembre 2017

LE PAIN DU BOULANGER Par Catherine DARRIET VANDAMME

Il était une fois, il y a bien longtemps, dans un pays très lointain, vivait un boulanger.

Il pétrissait sa pâte chaque jour mettant beaucoup de coeur à cet ouvrage. Il travaillait en développant de nombreuses qualités d’attention et d’émerveillement.

Les gens de ce pays venaient de très loin pour chercher ce pain qui restait délicieux des lunes durant.

Un jour, un berger se présenta et lui annonça que son père le demandait ; connaissant ce dernier, il ne pouvait s’agir que d’une histoire sérieuse, aussi décida- t-il immédiatement de se rendre à son chevet. Il prit la route et entreprit ce long voyage à la grande insatisfaction des villageois qui n’avaient jamais imaginer devoir un jour ne plus avoir leur boulanger et surtout leur bon pain !

Le boulanger prévoyant se munit de nombreuses miches pour des hommes et des femmes qu’ils pourraient rencontrer sur son chemin ; malgré la lourdeur des pains, c’était le cœur léger et heureux qu’il avançait tant son bonheur était grand de revoir son père.

Il s’était couvert d’une longue pèlerine car il faisait très froid dans la montagne et avait pris un bâton pour le soutenir dans sa marche.

Il marcha, marcha essayant de retrouver avec précision le chemin parcouru de si lointaines années auparavant dans l’autre sens quand il avait décidé, il ne savait plus comment, de partir loin de son père pour s’installer dans la plaine.

Alors qu’il marchait, il pensait à tout cela ; la nuit était tombée et ses yeux ne percevaient plus grand-chose aussi il s’arrêta près d’un ruisseau d’une eau claire et limpide, serpentant avec fluidité et vivacité. Il s’installa pour la nuit en ayant pris bien soin de mettre son précieux chargement à l’abri.

Il s’endormit et fut réveillé en sursaut par des grognements. Des bêtes attirés et séduits par la délicieuse odeur du pain essayait de s’emparer du sac, le mordant et le déchirant avec leurs crocs. Quand le valeureux boulanger réussit à les faire fuir, ils s’étaient bien servis et il ne restait qu’une petite boule de pain dorée. Le boulanger la serra contre lui et comme le jour commençait à poindre, il se remit en route et se hâta, traversant des zones arides et escarpées pour arriver au plus vite.

Tout à coup, il se sentit très abattu. Il ne reconnaissait plus le chemin, les larmes lui montèrent aux yeux car il sentait que les heures étaient comptées…
A cet instant, un oiseau, un superbe rossignol par son chant mélodieux attira son attention ; il chantait sur un arbre dont les branches formaient une échelle. Il grimpa aussitôt au sommet de l’arbre et avec cette nouvelle vision, il reconnut sa route. Il arriva à la nuit tombée près de la maison de son père. Il vit qu’il n’y avait pas de fumée qui passait par la cheminée, lui-même avait mis 2 jours pour parvenir à cet endroit si isolé où son père avait choisi de vivre seul méditant et soignant ceux qui arrivaient jusqu’à lui pour le solliciter pour sa grande sagesse. Au moment où il rentrait dans la cabane, son regard se porta dans un coin de la pièce ; son père était allongé sur une fine natte. Il s’accroupit immédiatement auprès de lui, le recouvrit de sa pèlerine, pris sa gourde d’eau et fit boire son père délicatement. Son père sourit avant même d’avoir ouvert les yeux car il savait qui se tenait là. La bonne odeur du pain, de la miche rescapée, de ces tout petits morceaux que son fils lui portait à la bouche avec précaution le firent sourire une nouvelle fois.

Le boulanger alla chercher du bois et il alluma un bon feu pour son père. La pièce commença à tiédir et le boulanger sortit quelque nourriture de sa besace pour préparer un repas simple à son père. Il lui donna quelques bouchées accompagnées de gorgées d’eau. Son père avait le regard qui brillait de joie et de bonheur malgré son état très faible ; le boulanger était heureux, il retrouvait son père et son pain le nourrissait. Son père parvint à lui murmurer à l’oreille : « C’est la vie ». Le boulanger ne savait pas si son père parlait de son pain, de sa venue ou de son issue qui paraissait inéluctable. Ils parlèrent un peu en se tenant la main avec pudeur puis s’endormirent.

Au matin, le visage du père radieux affichait un sourire et lui faisait un clin d’oeil. Les yeux du boulanger se remplirent de larmes d’avoir eu un père si bon.
Sur le chemin du retour, les paroles de son père lui trottaient dans la tête : c’est la vie, c’est la vie ; il savait qu’il rentrait avec un cadeau inestimable.


Il comprit qu’à sa façon de pétrir la pâte, d’attendre qu’elle se lève, de le cuire avec attention, bienveillance et émerveillement, il sût à compter de ce jour que son pain donnait la Vie, l’Énergie et l’Amour autour de lui.

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