(Conte
philosophique) Légende de la fée aux fleurs
Une vieille légende roumaine dit que lorsque tout ce
qui vit prit sa forme et sa dénomination définitive, seul l’homme fut mécontent
car la terre lui semblait toute noire et déserte. Il sentait que quelque chose
manquait pour que sa vie devînt belle et heureuse.
La fée aux fleurs apparut et, en entendant ses
lamentations, lui dit Je vais couvrir la terre d’une parure originale qui
serait à jamais ta consolation. A un signe de sa baguette magique, des fleurs
en grand nombre sortirent soudain de terre et vinrent se ranger les unes auprès
des autres. La fée trempa alors sa plume magique dans les couleurs de
l’arc-en-ciel et donna à chacune une coloration différente.
Sa plume fit merveille et bientôt toute la terre se
trouva couverte d’une multitude de fleurs de toutes sortes. Les fiers
chrysanthèmes purent s’enorgueillir de leurs robes éclatantes et multicolores,
les roses de leurs pétales semblables à du velours, les œillets, les jasmins,
les lilas, les giroflées de leurs tons chauds et leur suave parfum. Ce fut
ensuite le tour des craintives pensées, des timides violettes, si timides
qu’elles se cachent derrière leurs feuilles, des campanules et de leurs sœurs
les humbles fleurs des champs...
En même temps, la fée donnait à chacune d’elles un
nom et lui fixait le lieu de résidence qui serait désormais le sien. S’alignant
sagement, toutes ces fleurs attendaient le moment de gagner leur nouvelle
destination. Toujours peignant fleur après fleur, la fée se trouva nez à nez
avec un rayon de soleil qui l’observait depuis longtemps et l’avait suivie tout
au long de ses pérégrinations.
Mon bon père Soleil, aimerait, lui dit-il, faire
quelque chose pour l’humanité. Il souhaitait qu’une fleur à sa ressemblance
soit comme lui revêtue d’or pour apporter sa lumière aux humains durant les
journées grises où, caché par les nuages, il demeure invisible. La fée,
trempant aussitôt sa plume dans la poudre d’or en recouvrit le tournesol qu’on
appela désormais le « grand soleil ».
Un enfant lui demanda ensuite d’inventer une fleur
particulièrement belle, pour l’offrir à sa maman. Après avoir réfléchi, la fée
choisit le blanc qui est la couleur des candides pensées de l’enfance et,
voulant dépeindre la douceur d’un sourire maternel, créa le lys qui est et
restera à jamais le symbole de l’innocence.
Lorsque toutes ces fleurs furent prêtes pour
réconforter les pauvres humains, on entendit, venant de très loin, de sous un
amas de neige, comme un soupir d’enfant abandonnée : -Je suis la seule à avoir
été oubliée, bonne fée, disait une petite voie plaintive, et je suis restée
sans couleur et sans nom. Lorsque mes sœurs se disperseront sur la terre pour
accomplir leur mission et que leur beauté réjouira les regards, moi je resterai
ici et personne ne le saura.
Tout émue, la fée répondit : - Ne sois pas
malheureuse, petite fleur. Toi, qui es la dernière, tu seras la première. Parce
que tu as été oublié, petit perce-neige, c’est toi qui, avec tes clochettes
toutes blanches, seras chargé d’annoncer la venue du Printemps. A ta vue, tous
se réjouiront.
Et c’est depuis ce temps-là que ces fleurs poussent
aux quatre coins de la terre et qu’elles emplissent de joie le cœur de tous les
hommes épris de beauté...
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