(conte d’Elisabeth Gaillard d’après une légende ancienne – Jean Gaillard – Les animaux nos humbles frères p. 75)
Suivi de son chien, saint Roch s’avançait vers le Paradis. Il allait en franchir le seuil lorsque saint Pierre intervint :
« Mon ami, il vous faut laisser votre chien à la porte.
- Laisser mon chien à la porte ! s’écria saint Roch, mais c’est
impossible ! Pourquoi, lui, n’entrerait-il pas ?
- Parce que… parce que…
- Mais, grand saint Pierre, c’est une créature du Bon Dieu… Il a aussi sa place au paradis.
- Cependant …
- Je ne peux pas m’en séparer. C’est impossible !
- Eh bien ! Soit, entrez tous les deux… Et vous, saint Gilles ? Que fait cette biche à vos côtés ? Vous n’allez pas me demander de l’accepter aussi ?
- Si, grand saint Pierre… Je l’ai arrachée de la main des chasseurs. Je ne puis l’abandonner maintenant ! »
Et saint Gilles entra avec sa biche. Ce que voyant, saint Calais s’empressa de plaider, avec succès, la cause de son buffle, sauvé dans des circonstances semblables.
On entendait le joyeux tintement de clochettes. Saint Pierre regarda au loin : des troupeaux de moutons accouraient ; il y avait là, parmi eux, sainte Geneviève, sainte Germaine, sainte Jeanne d’Arc, et aussi la petite Bernadette.
« Mais je ne peux pas ouvrir la porte à tout ce monde »,
dit saint Pierre. les saintes bergères intercédèrent :
« Qu’importe le nombre ; la bonté de Dieu est infinie. »
On ne pouvait rien répliquer à cela. Et voilà qu’arriva saint François, entouré d’animaux de toutes sortes : oiseaux, poissons, brebis et agneaux, et aussi Frère Loup, et tant d’autres…
« Ils ont écouté docilement mes prédications ; on ne peut leur refuser le Paradis. »
Et saint Antoine de Padoue, qui lui aussi avait prêché aux bêtes, fit entrer les siennes.
« Et ma colombe ! »,
dit Noé.
« Et mon corbeau, qui m’a nourri dans le désert »,
rappela le prophète Elie. Le jeune Tobie plaida en faveur de son chien, fidèle compagnon de voyage ; et le pauvre Lazare en faveur de ceux qui léchaient ses plaies avec compassion.
« Et les lions qui ont refusé de me dévorer dans la fosse, remarqua le prophète Daniel, ne méritent-ils pas leur récompense ? »
Saint Pierre acquiesça ; et il déclara :
« Puisque toutes ces bêtes ont accès au Paradis, j’y admets aussi mon coq. »
On vit alors s’avancer saint Hubert avec son cerf : dans ses bois brille l’image de
« Et le chien qui me protégeait lorsque je devais, la nuit, me rendre au chevet des malades »,
dit Don Bosco.
« Mais, demanda saint Pierre à saint Martin de Porrès, quelles sont donc toutes ces petites bêtes qui vous suivent » ?
- « Ce sont des rats que j’ai sauvés, là-bas, dans mon monastère du Pérou. »
Nombre de saints se pressaient encore avec leurs bêtes. Parmi eux, les Pères du désert suivis de leurs animaux sauvages ; et si l’on reconnaissait saint Antoine et son cochon ; saint Siméon et saint Paul et leurs lions ; saint Macaire et sa bubale :
« Cette antilope m’a épargné de mourir de soif »,
dit-il. Et le saint ermite intercéda aussi pour la hyène et son petit qu’il avait guéri de cécité.
Saint Pierre n’en rejeta aucun. Mais il était un peu inquiet : Notre Seigneur lui avait confié les clés du Royaume ; serait-il content de lui ? Il fut bien vite rassuré : levant les yeux, il vit Jésus qui regardait, souriant avec bonté.
Il n’y avait, maintenant, plus personne à la porte du Paradis. Mais Jésus semblait attendre quelqu’un. il dit :
« Et l’âne et le bœuf qui m’ont réchauffé de leur haleine dans la crèche ?… Et l’ânesse et l’ânon que j’ai fait venir à moi à moi lors de mon entrée à Jérusalem ? »
Alors, on vit accourir l’âne et le bœuf l’ânesse et son ânon ; et saint Pierre leur ouvrit toute grande la porte.
Ce furent eux qui prirent la tête d’une longue procession qui s’avança vers le trône de Dieu. Le Père Éternel les accueillit tous avec bonté. Il regarda chacun avec amour ; et les bénit tous.
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