lundi 29 octobre 2018

La plus petite et minuscule des citrouilles


Christine Natale, The Littlest Pumpkin)


Il était une fois, au milieu d'un grand champ de courges, une petite et minuscule citrouille. Cette minuscule citrouille était à peine plus grosse qu'une noix. Ce n'était pas un bébé citrouille, puisque les bébés citrouilles sont verts et que cette minuscule citrouille était d'un bel orange éclatant, comme ses frères et soeurs. 

C'était la plus petite citrouille du monde entier. C'était aussi la citrouille la plus misérable de tout le champ.

«Ce sera une Halloween merveilleuse pour toi », murmura-t-elle, en pleurant, à son voisin. «Tu seras sûrement choisie par un enfant pour devenir sa lanterne d'Halloween. Mais moi, je suis si petite que personne ne pourrait me dessiner un visage, ni m'insérer une chandelle. En fait, lorsque les fermiers viendront dans le champ, ils ne me verront même pas et ils m'écraseront avec leurs grosses bottes. Je ne verrai probablement même pas l'Halloween.»

Les autres citrouilles avaient de la peine pour elle, mais elles ne pouvaient rien faire pour l'aider.
Ce matin-là, le fermier et ses deux garçons vinrent au champ pour voir toutes les magnifiques citrouilles rondes, orange et si belles parmi les vignes vertes et les grandes feuilles. Le fermier dit à ses fils : «Les citrouilles sont prêtes. Demain, nous reviendrons les cueillir, les mettre dans le camion et les apporter au marché. Les enfants les achèteront et les amèneront à leur maison pour en faire des lanternes.»

Cette nuit-là, dans le champ, toutes les citrouilles étaient excitées en pensant au lendemain. Une énorme citrouille se vantait qu'elle serait probablement la première à être choisie par un petit enfant chanceux. Mais une plus petite citrouille pensait plutôt qu'elle serait la préférée puisqu'un enfant pourrait facilement la prendre et la transporter.

Chaque citrouille y allait de son souhait : certaines désiraient qu'on leur dessine un visage heureux, d'autres voulaient faire peur et même quelques-unes souhaitaient un visage triste - juste pour s'amuser
La nuit avançait, il faisait de plus en plus noir, la pleine lune brillait au-dessus du champ. Les citrouilles étaient de plus en plus silencieuses, à part quelques chuchotements ici et là. Toute la nuit, la minuscule citrouille regardait, Madame la Lune, si haute dans le ciel. Elle lui parlait.
«Toi et moi, nous sommes semblables. Toutes les deux, nous sommes rondes. Mais toi tu es merveilleuse, sage et aimée. Moi je suis trop petite pour qu'on m'aime.»

La lune brillait de sa lumière d'amour, en tentant de réconforter la minuscule citrouille.


Avant l'aube, alors que la lune s'en allait tout doucement et qu'il faisait très noir, la minuscule citrouille vit une toute petite lumière briller au loin dans le champ. La lumière brillait et dansait à travers le champ, en s'arrêtant ici et là. La minuscule citrouille pensait qu'une étoile avait dû tomber du ciel sur la Terre, mais elle ne pouvait pas voir ce qu'elle faisait. La lumière s'approchait de plus en plus près.

Tout à coup, la lumière se trouvait juste là, en face de la minuscule citrouille et alors elle vit qu'il ne s'agissait pas du tout d'une étoile - c'était une jolie fée d'automne, habillée d'orange et d'or et dansant de mille feux. La fée d'automne se pencha vers la minuscule citrouille et cria : «Oh ! La voici ! La citrouille que je cherchais ! Toutes les autres citrouilles sont bien trop grosses pour moi, je ne pourrais jamais les ramener à la maison pour mes enfants. Celle-ci est parfaite !»

Une immense joie remplit le coeur de la minuscule citrouille lorsque la fée la cueillit et l'amena avec elle dans la forêt. Elles entrèrent au pied d'un vieil arbre, où plusieurs fées d'automne étaient réunies pour admirer leur belle citrouille d'Halloween. Les fées ont pris de minuscules couteaux et ont gravé un beau visage heureux sur la citrouille. Ensuite, elles prirent de petites chandelles de fées, qui changent de couleurs quand elles sont allumées et en placèrent dans la citrouille. Voilà, la minuscule citrouille était devenue une magnifique lanterne d'Halloween.

Alors, toutes les fées d'automne commencèrent les célébrations de leur festival. Il y avait toutes sortes de nourriture et de sucreries, plein de chants, de musique et de danse. La minuscule citrouille passa une magnifique Halloween !

samedi 27 octobre 2018

Évangile de Jésus Christ selon Saint Marc, chapitre 10, 46 - 52


Confiance, lève-toi, il t’appelle

En ce temps-là, tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, le fils de Timée, Bartimée, un aveugle qui mendiait, était assis au bord du chemin. Quand il entendit que c'était Jésus de Nazareth, il se mit à crier : ``  Fils de David, Jésus  prends pitié de moi ! `` Beaucoup de gens le rabrouaient pour le faire taire, mais il criait de plus belle : ``Fils de David, prends pitié de moi !``

Jésus s'arrête et dit : `` Appelez-le.`` On appelle donc l'aveugle, et on lui dit : `` Confiance, lève-toi ; il t'appelle. `` L'aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus. Prenant la parole, Jésus lui dit : `` Que veux-tu que je fasse pour toi ? — L’aveugle lui dit :<>. ``

 Et Jésus lui dit : `` Va, ta foi t'a sauvé. ``

 Aussitôt l'homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin.



Petit commentaire

La guérison de Bartimée

Voir et marcher

 `` Aie confiance, lève-toi, Jésus t’appelle. `` (v. 49)

Nous avons l’impression parfois d’être aveugles, de ne rien comprendre à la vie, ou encore d’être en marge, en dehors des réseaux et de leur circulation; ou nous pouvons nous percevoir comme figés, incapables de faire un pas en avant. Et pourtant, des passages, des transformations peuvent advenir sur nos chemins. Nous connaissons des personnes qui ont vécu de telles conversions et qui maintenant voient, participent et avancent sur un chemin même difficile et risqué.

 La guérison de l’aveugle Bartimée nous parle justement de ces passages, de ce chemin de conversion. Ce récit nous montre une vie transformée. Au début, Bartimée ne voit pas; il est assis au bord du chemin, il n’est même pas sur le chemin; et il mendie. À la fin, non seulement il voit mais aussi il est sur le chemin et il marche à la suite de Jésus. Il est devenu un disciple. Entre le début et la fin de ce parcours, Bartimée a vécu une expérience de conversion, une transformation, qui comprend plusieurs étapes. C’est vraiment un itinéraire spirituel, qui peut ressembler aux nôtres, sur nos propres chemins.

 D’abord, quand il est assis au bord du chemin, même s’il ne voit pas et ne bouge pas, il fait déjà quelque chose : il crie, il implore. Au moins il peut faire cela. Il y a déjà en lui une quête et un intérêt pour Jésus. Il fait appel à la compassion de Jésus. Mais sa quête de guérison rencontre des obstacles : beaucoup le rabrouent pour qu’il se taise. Devant cette adversité, il ne se laisse pas arrêter : il continue de crier, il insiste. Son désir le pousse du dedans, malgré le mur de silence que certains veulent bâtir entre lui et Jésus.

 Son effort finalement n’est pas vain. Jésus l’entend et demande aux gens de l’appeler. Alors ces gens appellent l’aveugle, ils lui disent : `` Aie confiance, lève-toi, Jésus t'appelle. `` Cela est magnifique et dit bien que, pour aller à Jésus, nous avons besoin que d’autres nous appellent à la confiance et nous soutiennent. Notre propre force ne suffit pas. Nous avons besoin que des gens nous disent : `` Jésus a entendu ton cri, il s’intéresse à toi; ne reste pas assis, passif et résigné à ta petite vie; reprends confiance, tiens-toi debout, tu n’es pas abandonné. `` Jésus passe par ces relais, ces médiateurs, pour venir nous toucher. De même, à notre tour, nous pouvons devenir pour d’autres ces voix qui les appellent à la confiance et à se lever, à sortir de leur aveuglement et de leur défaitisme.
 Mais il ne suffit pas d’entendre cet appel. Il faut ensuite agir nous-mêmes, faire notre part. C’est ce que fait Bartimée : il se lève avec élan et il va vers Jésus. Personne ne peut faire à sa place, à notre place, ce geste décisif de nous lever pour aller vers Jésus. L’énergie est revenue, Bartimée bondit, ou plutôt rebondit. Il est maintenant en mouvement. Mais il a fallu les étapes précédentes pour qu’il ose enfin bouger les pieds et se mettre sur le chemin, celui d’une vie nouvelle.
 Puis vient le moment de la rencontre personnelle entre Jésus et Bartimée, avec son dialogue et sa guérison, où confiance, salut et transformation du regard sont liés. ``Ta foi t’a sauvé `` : ta confiance t’a rendu libre, elle t’a remis debout. Et Jésus appelle à nouveau Bartimée mais pour un envoi : `` Va ``, maintenant regarde et marche par toi-même, poursuis ta route, elle ne fait que commencer.
Après ce moment de rencontre, Bartimée voit : ce sont les yeux de la foi qui se sont ouverts à la suite de cette démarche et maintenant il peut suivre Jésus sur le chemin, celui de la mission, celui qui mène à Jérusalem et à la pâque. Chemin de rencontres, de recherches, de conflits, chemin qui demande liberté du cœur et courage, chemin où l’expérience croyante, espérante et aimante nous fait avancer plus loin, jusqu’au bout.

 Cette histoire de Bartimée, c’est aussi celle de tant de gens et c’est la nôtre, sur nos chemins, où que nous soyons rendus. Nous pouvons nous retrouver à l’une ou l’autre étape du parcours, criant au bord du chemin ou bondissant vers Jésus. Nous ne sommes jamais en dehors du récit et de son itinéraire, appelés à voir et à marcher sur un chemin de conversion.

DANIEL CADRIN

1.      Questionnement : Pour favoriser la réflexion et l’approfondissement du récit :


• A-t-il été facile pour Bartimée de rencontrer Jésus ? Qui l’a aidé ? Qui l’a gêné ?
• Et nous ? Comment pouvons-nous rencontrer Jésus ? Pouvons-nous être aidé ? Pouvons-nous aider ? Pouvons-nous, au contraire, gêner ?
• Vous remarquerez que Jésus ne s’adresse pas directement à Bartimée, mais qu'il dit aux gens : "Appelez-le". Fait-il encore comme cela aujourd’hui ?
• Connais-tu des gens que Jésus appelle aujourd’hui ? Et toi, t'appelle-t-il ?
• Qu'est-ce que Bartimée aurait pu demander d'autre que la vue ?
• Bartimée jette son manteau. Que peut représenter ce manteau ? Jésus va t-il lui en donner un nouveau ?
• Y a t-il des moments à l’église où les vêtements sont importants, où on revêt un nouveau vêtement ? Comment est ce vêtement ?
• Dans ce récit, n’y a t-il que Bartimée qui change ? Qui d’autre encore ? Pourquoi ? A votre avis, les gens sont-ils plus heureux au début ou à la fin du récit ? Pourquoi ?
• Grâce à quelqu'un, grâce à qui ? Et toi, à quelle occasion t'est-il arrivé de changer (d'attitude) en pensant à ce que Jésus demande ?
• As-tu déjà entendu dire : "Seigneur prends pitié" ? Quand ?
• Sommes-nous parfois un Bartimée ?
• Peut-on voir et être aveugle ? Expliquez.
• "Va, ta foi t’a sauvé" ! Est-ce la foi qui fait voir ? Que voit-on quand on a la foi ?
• Trouve des mots de la famille de "foi" (fidélité, confiance, méfiance, etc.)
• Tu as assisté à un baptême : y a-t-il des éléments communs ? (appel, profession de foi, vêtement,...)

Remplir les blancs

"Que veux-tu que je te fasse?" Jésus lui a demandé.  L'homme a dit: "Rabbi, je veux voir." Marc 10 46-52

 Complétez le paragraphe en complétant les blancs avec les mots corrects de la banque de mots suivant.

 Mendiait- foi –Jésus- silencieux- crier- aveugle- sauvé -pitié –retrouva- vue- voir

__________ avec ses disciples et  une grande foule,  sortait  de la ville, un homme  __________, Bartimée, était assis au bord du chemin et ___________. Quand il a entendu dire que c'était Jésus de Nazareth, il a commencé à __________, "Jésus, Fils de David, prends __________ de  moi!"
Beaucoup lui ont dit d'être __________, mais il a crié de plus belle: "Fils de David, aie pitié de moi! " "Que veux-tu que je te fasse?" Jésus lui a demandé.
L'aveugle a dit: "Rabbi, je veux __________."
"Allez," dit Jésus, "va ta  __________ t’a __________". Aussitôt l’homme __________ sa __________ et a suivi Jésus sur le chemin.

Réponses : Jésus-  aveugle- mendiait- crier- -pitié- silencieux- voir- foi- sauvé- retrouva- vue

vendredi 26 octobre 2018

UN ÉLÉPHANT ET LES AVEUGLES


Il y avait autrefois six hommes aveugles qui vivaient aux abords d’un petit village de Bénarés.

Un jour, ils entendirent les villageois et les enfants qui disaient : « Hé ! il y a un éléphant dans le village aujourd’hui.»

Les aveugles n’avaient aucune idée de ce que pouvait être un éléphant.
Ils en discutèrent entre eux et décidèrent :
« Même si nous ne sommes pas en mesure de le voir, nous pouvons y aller et nous avons de toute façon nos autres sens pour aussi bien l’observer que pour le découvrir. »

Tous allèrent donc là où était l’éléphant et chacun d’eux s’en approcha pour le sentir et le toucher.
Perdant pied, le premier alla buter contre son robuste et large flanc. Il s’exclama aussitôt : « L’éléphant est un mur immense, tiède et un peu rugueux. »

Tout en palpant une de ses défenses le second s’écria : « Je sens quelque chose de rond, de lisse, qui est long et pointu… Il ne fait aucun doute que cet éléphant extraordinaire ressemble beaucoup à une lance ! »

Le troisième s’avança vers l’éléphant et, saisissant par hasard la trompe qui se tortillait, cria sans hésitation : « Oh, je vois que l’éléphant est certainement une sorte de gros serpent ! »

Le quatrième, de sa main hésitante, se mit à palper le genou et la jambe. « De toute évidence, cet animal fabuleux ressemble à un arbre, j’en touche ici le tronc ! »

Le cinquième qui se tenait bien droit, les bras tendus et en l’air, lui toucha l’oreille et dit : « Même le plus aveugle des hommes peut dire à quoi ressemble un éléphant ; nul ne pourra me prouver le contraire, ce magnifique éléphant est un grand éventail ! »

Oh non ! dit le sixième qui commençait tout juste à vouloir tâter l’animal, la queue qui se balançait calmement lui tomba dans la main. « Je vois que l’éléphant n’est finalement rien d’autre qu’une corde ! »

Ils commencèrent alors à se disputer sur ce qu’était l’éléphant et chacun d’eux insistait sur le fait qu’il avait raison.
La discussion s’envenimait lorsque le roi de Bénarès qui était un homme très sage passa par là.
Il s’arrêta et leur demanda: « Pourquoi tout ce tumulte, quelle est donc la question ? »
Ils lui répondirent : « Nous n’arrivons pas à nous entendre sur ce qu’est un éléphant ». Et chacun d’eux expliqua alors ce qu’il pensait qu’était l’éléphant.
Le sage roi de Bénarès leur expliqua alors calmement :
« Vous avez tous raison. La vision de chacun est différente des autres parce que chacun d’entre vous a touché une partie différente de l’éléphant. Ainsi l’éléphant a tous les traits que vous avez dit. »

Oh !, dirent les six aveugles. Et il n’y eu plus de dispute ni de combat, car ils se sentaient heureux d’avoir tous eu raison.

Quelle est la morale de cette histoire ?
C’est qu’il y a peut-être une certaine vérité dans ce que quelqu’un dit ou pense.
Parfois, nous pouvons voir cette vérité et parfois pas, car tout le monde peut avoir un regard différent.
Regard avec lequel il peut arriver que nous ne soyons pas toujours tous d’accord.
Chacun peut avoir partiellement raison tout en étant dans l’erreur. Si vous connaissez et considérez le tout, vous vous éloignez de l’erreur.
Donc, au lieu d’argumenter ou de vous disputer comme les aveugles, vous devriez dire :
« Oui je comprends, vous avez peut-être vos raisons. »

De cette façon, vous n’avez pas besoin d’argumenter ou de vous disputer pour savoir qui a raison ou non.
La vérité peut être vécue de façons différentes. C’est ainsi qu’elle enseigne à être tolérant envers le point de vue des autres, cela permet de vivre en harmonie avec les gens de pensée différente et d’enrichir votre perception et vos conclusions.
Nul ne sait réellement si Dieu existe ou pas, tout est une question de foi. Certains dirons que nous ne sommes pas aveugles, que nous avons une conscience. Et pourtant, nous ne voyons et entendons qu’une faible partie du spectre. Nous sommes des handicapés visuels sans le savoir.

L’autre leçon est qu’une fois que chacun a accepté d’avoir une partie seulement de la vérité, chacun peut ensuite admettre que les autres ont, eux aussi, une partie de la vérité, et donc entretenir avec les autres un respect mutuel.

La vérité n’est alors jamais possédée par une seule personne, en excluant les autres de sa jouissance, non, elle serait ce qui adviendrait après une réflexion collective, une mise en commun de la part de vérité de chacun, pour en faire un tout !!!


mercredi 24 octobre 2018

Conte "La fenêtre aveugle"


Il était une fois un jeune prince qui vivait avec insouciance dans le palais de son père.

Un jour, il demanda au vieux sage chargé de son instruction : L’argent est-il quelque chose de bon ou de mauvais ?

L’homme emmena le prince dans le salon du palais et le fit asseoir face à la vaste baie vitrée donnant sur la grand-place. Que vois-tu ? interrogea l’ancien.

Les jeunes filles qui dansent près du lavoir, les artisans qui travaillent dans leurs échoppes. Le sage disparut un instant et revint avec un seau et un pinceau. Qu’est-ce c’est ? dit le prince. Un vernis à base d’argent.

Le vieil homme sortit et recouvrit toute la baie vitrée d’une épaisse couche de peinture.  Lorsqu’il rentra, le prince s’exclama : Mais il fait sombre, je ne vois plus rien. Le sage alluma une lampe et demanda : À présent, que vois-tu par la baie vitrée ? Je ne vois plus rien, sauf moi, comme dans un miroir, répondit le prince, je n’arrive plus à voir les autres.

Tu as la réponse à ta question, dit le vieux sage. Et il s’en alla. Le prince ordonna à ses serviteurs  de nettoyer la baie vitrée.  Mais le vernis résistait.  À force de frotter,  la vitre réapparut, mais entièrement dépolie.

Irrité de ne pouvoir retrouver une vision claire, le jeune prince, dans un accès de colère, lança violemment la lourde coupe d’argent qu’il tenait à la main contre la vitre.  Celle-ci vola en éclats.

Le prince put alors revoir toute la beauté du monde extérieur. Mais en plus, il pouvait maintenant entendre les cris des enfants qui jouaient, les chants des jeunes filles qui dansaient et les bruits provenant des échoppes des artisans.  Il pouvait sentir le parfum des épices et la caresse du vent. Il traversa le cadre vide de la fenêtre et se fondit dans la vie de la grand-place.

dimanche 21 octobre 2018

Histoire pour enfants


Comme moi ! Kylie Ward

Note : J’ai entendu cette histoire à l’église il y a 18 ans - je ne me souviens pas d’où elle venait mais je l’ai utilisée et racontée, et j’ai toujours eu des réactions positives. Au fur et à mesure, elle a changé et est devenue ce qu’elle est aujourd’hui. L’idée est simple, c’est d’aller voir plus loin que notre bout du nez et de se mettre à la place des autres en communiquant avec eux.

Cette histoire peut être lue comme elle est écrite ; cependant, c’est mieux de la mimer. L’histoire a besoin de beaucoup de tons de voix et de gestes. Si elle est enregistrée, baisser le ton de voix pour démontrer l’humilité nécessaire aux changements. 1 personne peut faire les 4 caractères ou 4 personnes, chacune mimant une des parties de l’histoire. Il est possible aussi de se déguiser comme les animaux ou tout simplement en utilisant des masques. Cette histoire est drôle et touchante mais son message est clair, nous devons aller vers ceux qui ne sont pas comme nous, ou qui ne sont pas de notre famille - nous serons ainsi bénis. Il y a aussi des questions à la fin qui peuvent permettre au message de se dévoiler peu à peu.

Il était une fois une reine abeille qui était très belle. Elle s’ennuyait toute seule dans sa ruche. “Hmm,” se disait-elle. “J’aimerais bien jouer avec quelqu’un, quelqu’un comme moi. Beau, intelligent et gentil” alors qu’elle s’admirait dans le reflet de la fenêtre tout en criant pour appeler son fidèle serviteur abeille. “Oui Maître”, dit-il alors qu’il arriva péniblement, jambes enchaînées, en toussotant et essuyant son nez qui coulait. “Va et trouve-moi quelqu’un comme moi, avec qui je peux jouer. Beau, intelligent et gentil” disait-elle d’une voix douce mais trompeuse. Le serviteur abeille courut aussi vite que ses jambes enchaînées le lui permise. Il alla partout, loin et près, jusqu’à ce qu’il trouva une créature très intéressante - elle était noire avec 8 jambes. Quel genre de créature pouvait-il être ? Vous avez deviné - une araignée !!! “Votre Majesté, dit le serviteur abeille, “ Je vous ai amené quelqu’un avec qui vous pouvez jouer et qui est juste comme vous !”. La reine abeille fixa la créature. Elle fit une grimace comme si elle avait vu quelque chose d’horrible. “Fais-la partir et ramène-moi quelqu’un avec qui je peux jouer mais qui est tout comme moi. Beau, intelligent et gentil”, disait-elle d’une voix méchante. Le serviteur abeille s’essuya le nez et repartit. Il alla à nouveau partout et trouva le partenaire de jeu idéal - cette créature était magnifique et pleine d’énergie. Il s’est dit, cette fois j’ai trouvé le bon partenaire de jeu. Majesté, s’écria-t-il, “ J’ai trouvé quelqu’un qui peut jouer avec vous ”. Il s’arrêta, renifla et dit : “ Elle est belle !” La reine abeille stoppa son discours. “Ceci” dit-elle n’est pas beau. La créature était noire avec des ailes rouges marquées de points noirs. Quel genre de créature était-ce donc ? Oui, vous l’avez deviné - une coccinelle. Le serviteur abeille voyait bien que la reine abeille était très fâchée; elle s’en alla avec un visage plein de colère. On aurait dit qu’elle allait exploser. Elle s’approcha tout près du serviteur abeille : “Quelqu’un TOUT COMME MOI !!!” s’écria-t-elle : “ BEAU, INTELLIGENT ET GENTIL, MAINTENANT VA-T-EN !” Le serviteur abeille s’en alla sur les collines, sur les montagnes, à travers les vallées, jusqu’à ce qu’il trouve une créature comme l’abeille avec des ailes, pouvant voler et qui était toute noire. Quelle créature croyez-vous que c’était ? Oui, vous avez deviné - une mouche. Elle s’écria de toutes ses forces : “Beurk, beurk, beurk! Fais-la partir”. La reine abeille était très fâchée. “ Je veux quelqu’un tout comme moi. Je ne veux pas jouer avec quelqu’un qui n’est pas aussi beau et intelligent et gentil que MOI, rouspéta-t-elle. Elle tourbillonna dans tous les sens, jusqu’à en être épuisée. Elle commença à se sentir bien seule n’ayant toujours personne avec qui jouer... Soudain, elle entendit un bruit de la pièce d’à côté. Elle écouta et entendit des rires, des chants et des jeux. Elle se rapprocha de la porte en se demandant quelles abeilles pouvaient bien s’amuser comme ça... Elle ouvrit la porte juste un petit peu et regarda à travers la petite ouverture. Elle était complètement choquée ! Il y avait l’araignée, la coccinelle, la mouche et le serviteur abeille qui jouaient ensemble. “Comment cela est-il possible ?” Ces créatures ne viennent pas de la famille des abeilles. Comment peuvent-elles jouer ensemble ?” pensa-t-elle en les observant...ça ne gênait personne que serviteur abeille ne courre très vite, et quand il tombait, l’araignée l’aidait en utilisant toutes ses jambes. Lorsque dans un jeu il fallait voler, l’araignée n’ayant pas d’ailes, tout le monde se mettait d’accord pour n’utiliser que leurs pattes. Chacune avait sa place et elles s’amusaient tout le temps. Cela prenait du temps et de la réflexion vu leurs différences, mais elles trouvèrent toujours une solution. Alors que reine abeille observait, elle se rendit compte que ce qui se passait était merveilleux. Le fait que tout le monde était différent rendait les jeux encore plus drôles. Elle se regarda et compris qu’elle aussi était différente, elle était plus grande avec d’autres couleurs. Elle se demanda comment elle pourrait bien jouer. Elle espérait pouvoir, elle en avait vraiment envie. Elle ne pensa pas qu’elles voudraient maintenant jouer avec elle, elle n’avait pas été gentille. Mais peut-être, se disait-elle, je peux demander. “Ummmm excusez-moi” dit-elle d’une voix toute douce. “ Seriez-vous d’accord, j’étais juste en train de penser, est-ce que vous me laisseriez jouer avec vous ? Je sais que je suis un peu différente mais j’aimerais vraiment “. Le serviteur abeille en s’essuyant le nez comme d’habitude répondit :” Bien sûr, à ton tour de nous attraper” cria l’araignée alors que toutes les créatures coururent dans différentes directions.

Application :

Quelle créature es-tu ? Comment tu te sens lorsque les autres ne veulent pas jouer avec toi ? Comment c’est d’être différent ? Qu’est-ce qui se passe lorsqu’on joue tous ensemble ? Qui dans cette histoire a fait des efforts ? Comment penses-tu toi aussi faire des efforts ? Dieu nous a créés chacun unique et spécial. Nous sommes tous précieux et magnifiques à ses yeux. Dieu nous aime et veut que nous nous aimions. Tu sais, c’est drôle de jouer avec notre famille et des gens qui sont comme nous, mais on peut aussi s’amuser avec des gens différents qui viennent d’autres familles. Certains viennent de grandes familles et d’autres de petites familles. Il y a parfois des familles avec seulement 1 adulte et d’autres avec plusieurs adultes. Certaines familles ont beaucoup d’enfants et d’autres pas du tout. Bien que chaque famille soit différente, chacun peut participer, soutenir, aider ou jouer avec d’autres familles. Quand nous nous rapprochons d’autres familles, nous serons bénis par Dieu.

 Kylie Ward est responsable des Ministères de la famille et des enfants de l’union de la Nouvelle Zélande des adventistes du 7e jour.

samedi 20 octobre 2018

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc. 10, 35-45


Celui qui veut devenir grand sera votre serviteur.
En ce temps-là, Jacques et Jean, les fils de Zébédée, s’approchent de Jésus et lui disent : « Maître, ce que nous allons te demander, nous voudrions que tu le fasses pour nous. » Il leur dit : « Que voulez-vous que je fasse pour vous ? » Ils lui répondirent : « Donne-nous de siéger, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire. » Jésus leur dit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire, être baptisés du baptême dans lequel je vais être plongé ? » Ils lui dirent : « Nous le pouvons. » Jésus leur dit : « La coupe que je vais boire, vous la boirez ; et vous serez baptisés du baptême dans lequel je vais être plongé.     Quant à siéger à ma droite ou à ma gauche, ce n’est pas à moi de l’accorder ; il y a ceux pour qui cela est préparé. »

Les dix autres, qui avaient entendu, se mirent à s’indigner contre Jacques et Jean. Jésus les appela et leur dit : « Vous le savez : ceux que l’on regarde comme chefs des nations les commandent en maîtres ; les grands leur font sentir leur pouvoir. Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi. Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur. Celui qui veut être parmi vous le premier sera l’esclave de tous : car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude. »



Petit commentaire

Être un bon roi, ce n'est pas d'abord porter une couronne mais bien diriger, c'est-à-dire bien servir. Les deux apôtres se préoccupaient de la couronne. Jésus leur a montré ce qu'il fallait faire pour bien diriger. Ensuite, il a fait comprendre à tous les autres apôtres comment il fallait se comporter pour participer à sa royauté. Quand on sert un roi dont la couronne est faite d'épines, nos priorités deviennent différentes. On ne connait rien concernant l'âge de Jacques mais on sait que Jean était le plus jeune des apôtres. En considérant leur intervention, on peut croire que leur démarche était futile. Quand des jeunes veulent s'engager, ils montrent souvent un empressement exagéré et semblent s'occuper de détails très secondaires plutôt que de s'attacher à l'essentiel. Nous, les adultes, ne devons pas premièrement repousser leur élan mais le rediriger vers l'essentiel. Ce fut d'ailleurs l'action du Christ. Il faut considérer ce que Jean a fait plus tard. Lui le seul parmi les apôtres, il s'est tenu au pied de la croix avec Marie et il s'est ensuite occupé d'elle, «le disciple la prit chez lui.» (Jean 19, 27) Il est l'auteur du quatrième évangile et de trois épîtres pleines de sentiments très évangéliques. La tradition nous apprend qu'il est mort à un âge avancé et qu'il est toujours resté fidèle à sa vocation. Il est clair qu'il a bien compris la leçon de Jésus concernant l'importance de boire le calice et que la question des sièges de droite et de gauche était bien secondaire. L'essentiel, le véritable message de cette péricope évangélique c'est le service d'abord. Les disciples du Christ se doivent d'être des disciples missionnaires, des serviteurs de leurs frères et sœurs. Porter l'Évangile au monde avec tout le monde, les jeunes et les moins jeunes, c'est s'ouvrir aux autres, leur être sympathiques même s'ils sont indifférents ou même parfois antipathiques envers nous. «Père, pardonnez-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font.» (Luc 23, 34)

I. OBSERVATIONS / QUESTIONS

1. Que demandent vraiment Jaques  et Jean? Que veulent-ils vraiment? Quels étaient ces "sièges"?
2. Dans quelle sorte de «gloire» envisagent-ils l'entrée de Jésus?
3. Qu'est-ce que “la coupe” et le “baptême” dont Jésus parle?
4. Qu'est-ce que Jésus veut dire par “m'asseoir à ma droite ou à ma gauche n'est pas à moi d'accorder… c'est pour ceux pour qui cela a été préparé”?
5. Pourquoi les 10 autres disciples se fâchent-ils contre la demande de James et John?
6. Quelle leçon les disciples auraient-ils déjà appris dans Marc 9:33?
7. Comment la compréhension de la grandeur, du pouvoir et de l'autorité de Jésus diffère-t-elle de celle des dirigeants païens?
8. Le titre de Fils de l'homme de Jésus utilisé dans le v. 45 a-t-il une signification?
9. Quel est le principal défi de Jésus dans ce passage? Quel point veut-il le plus faire comprendre à ses disciples?

Petit QCM sur la mission ! À vous de jouer...

«L’ Église étant tout entière missionnaire, et l’œuvre de l’évangélisation étant un devoir fondamental du Peuple de Dieu, le saint Concile invite tous les chrétiens à une profonde rénovation intérieure, afin qu’ayant une conscience vive de leur propre responsabilité dans la diffusion de l’ Évangile, ils assument leur part dans l’œuvre missionnaire auprès des nations.»(Vatican II, Ad gentes. 35).

1. Un missionnaire c’est :
a) un prêtre barbu
b) un voyageur international
c) quelqu’un qui annonce l’Évangile
d) un agent pastoral solidaire de l’humanité

2. Jésus a dit :
a) « Allez, développez tous les peuples !»
b) « Allez, faites des disciples et baptisez-les !»
c) « Allez, bon voyage et soyez prudent !»
d) « Allez voir à Katmandou si j’y suis !»

3. Combien y-a-il d’œuvres dans les Œuvres  Pontificales Missionnaires ?
a) 2
b) 4
c) 8
d) 16

4. Quel(le) saint(e) est vénéré(e) dans une chapelle de ND de Paris ?

a) Pauline Jaricot
b) Marie Madeleine
c) Georges Darboy
d) Paul Chen

5. En 1990, 472130 baptêmes étaient célébrés en France ; combien en 2015 ?
a) 128214
b) 262314
c) 403648
d) 492703

6. Entre 2005 et 2014, le nombre de baptisés dans le monde connaît une évolution :
a) -15%
b) -3%
c) +5%
d) +14%

7. Combien y a-t-il de prêtres dans le monde en 2015 ?
a) 138207
b) 303418
c) 415656
d) 638212

8. Qui est le (la) Saint(e) Patron(ne) des missions ?
a) Sainte Jeanne d’Arc
b) Saint François-Xavier
c) Saint Pierre Clavier
d) Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus

9. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus est docteur de l’Église depuis :
a) 1925
b) 1950
c) 1981
d) 1997

10. Le nombre de circonscriptions ecclésiastiques catholiques dans le monde (diocèse, vicariat, préfecture apostolique) est en 2015 de :
a) 1002
b) 2004
c) 3006
d) 4008

Réponses : 1c quelqu’un qui annonce l’Évangile  – 2b « Allez, faites des disciples et baptisez-les !» – 3b 4 – 4d Paul Chen  – 5b 262314  – 6d  +14%  – 7c  415656 – 8b et 8d Saint François-Xavier, Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus – 9d  1997 – 10c 3006

https://www.opm-france.org/la-journee-missionnaire-mondiale/


jeudi 18 octobre 2018

L’ami pommier


Au sortir de la ville, dans une vieille maison timidement cachée au fond d’un beau jardin, vivait jadis un homme qui avait de bons yeux rieurs derrière ses petites lunettes rondes, et un air doux comme un mouton sous sa toison de boucles brunes.
      Il s’appelait François. Chaque matin, en se levant, François contemplait son arbre : un magnifique pommier qui poussait sous ses fenêtres. Rien qu’à le voir, si grand, si beau, il était heureux. Et chaque soir, en rentrant du travail, il passait des heures à regarder les oiseaux qui nichaient dans son feuillage.
      Car on ne s’ennuie pas à regarder les arbres : certains sont même de véritables magiciens. Au printemps, ils disparaissent sous un grand manteau de fleurs où butinent les abeilles. Au plus chaud de l’été, ils offrent leur ombre fraîche à tous ceux qui, le visage en feu, fuient le soleil brûlant.
      Puis, quand vient l’automne, ils lancent à la volée des gerbes de feuilles jaunes, rouges ou rousses qu’un vent fougueux éparpille au loin sur les trottoirs et les pavés… en attendant que l’hiver referme sur eux sa grande cape blanche.
 François aimait son arbre depuis toujours. Quand il était petit, il grimpait souvent dans ses branches et y restait caché lorsque sa maman l’appelait pour le dîner. Et maintenant qu’il avait grandi, le seul fait de l’admirer lui procurait toujours autant de joie. Il ne lui fallait rien de plus pour être heureux. Parfois, quelqu’un s’arrêtait derrière la clôture – le plus souvent un homme, ou une femme avec un enfant – et il les entendait dire : « Regarde, le bel arbre ! » Mais la plupart des gens, trop pressés, passaient sans le voir.
   Les années passèrent.


      François avait vieilli. De profonds sillons creusaient à présent son visage, et ses cheveux d’abord grisonnants, puis blancs, avaient fini par se clairsemer, emportés par le temps comme les feuilles par le vent. Seule sa barbe avait poussé, telle une longue écharpe de laine blanche. François était cependant toujours aussi heureux et ne se lassait pas d’observer son arbre et les oiseaux.
      S’il lui arrivait de surprendre des enfants en train de lui chiper des pommes, il riait de bon cœur en disant : « Les fruits volés sont toujours les meilleurs, pas vrai ? »
      Sur quoi les coupables, gênés, s’enfuyaient à toutes jambes.
  Mais un jour, un terrible malheur arriva. L’automne était de retour et un vent furieux faisait claquer les volets et voltiger les feuilles. Au-dessus des collines voisines, les nuages noirs semblaient si menaçants que chacun s’était empressé de rentrer chez soi. François ferma lui aussi sa fenêtre au premier éclair, mais il resta dans la pénombre à observer l’orage.
      Bientôt, d’énormes gouttes vinrent s’écraser contre la vitre, et l’averse s’abattit avec une telle force sur la petite ville qu’on eût dit qu’une main furieuse déversait sur elle un gigantesque tonneau. Déchiré d’éclairs, le ciel d’encre résonnait de coups de tonnerre, de plus en plus proches, de plus en plus violents.
      Et soudain, le cœur de François cessa de battre : dans un vacarme assourdissant, la foudre venait de tomber sur son pommier ! Sous ses yeux, le tronc se fendit dans un long craquement.
      Puis la pluie vint laver sa blessure.
      Quand l’orage s’éloigna, il laissa derrière lui un bien triste spectacle. Le pommier, jadis si beau, était là, tout pantelant, plus biscornu encore que la vieille maison. Du haut des branches jusqu’aux racines, une longue cicatrice entaillait le tronc.
      « Ça fait mal, je sais », murmura François pour le consoler, tout en caressant l’écorce calcinée. L’arbre gémissait à voix basse. Et si les hommes savaient que les arbres pleurent, eux aussi, François aurait sans doute remarqué les perles d’eau qui scintillaient le long du tronc.
Le printemps suivant fut chaud et ensoleillé. Les oiseaux chantaient à tue-tête. Seule sur le ciel bleu, se détachait la triste silhouette sombre et noueuse du pommier. Des feuilles minuscules avaient bien repoussé sur ses branches, çà et là, ainsi que quelques fleurs dans lesquelles butinaient les abeilles comme autrefois.
      Mais l’arbre avait beau faire, il n’avait plus la force de retrouver sa beauté d’antan. Sa plaie béante le faisait souffrir dès qu’un rayon de soleil l’effleurait ou que le temps changeait.
      Mais ce n’était pas le pire…
      Ces derniers temps, les gens qui passaient s’arrêtaient souvent pour le regarder et, l’air dédaigneux, le traitaient d’horreur ou bien d’affreux épouvantail.
      « C’est une honte, il faut l’abattre ! » lança un jour une femme. Et quelqu’un renchérit, disant qu’il serait temps de le remplacer par un parking ou un joli gazon.
      Plus triste de jour en jour, l’arbre arrosait tant de ses larmes les quelques fleurs qui lui restaient qu’elles fanèrent plus vite encore. François était furieux d’entendre les gens parler ainsi.
      Il aimait son arbre tel qu’il était et, chaque soir, allait caresser son écorce tout en guettant le chant des oiseaux dans ses branches mortes.
      « Allez-vous-en ! » criait-il parfois, hors de lui, en chassant les mauvaises langues à grands coups de balai. Mais en vain.
      Le lendemain, d’autres passants s’arrêtaient et le critiquaient de plus belle.

Alors un jour, François se décida.
      De bon matin, il partit sur son vieux vélo rouillé, souriant si gaiement en pédalant que ses voisins s’en étonnèrent. Quelques heures plus tard, il revint chargé d’un gros paquet qu’il déposa au jardin. Puis il alla chercher sa pelle et se mit à creuser avec ardeur au pied du pommier, ne s’arrêtant pour se reposer que lorsque le trou fut bien profond. Et dans ce trou, François planta un tout jeune pommier qui arrivait à peine à la hauteur de sa barbe blanche.
      « Il s’est enfin décidé à arracher ce vieil arbre ! » se dirent les gens.
 Mais François se contenta de sourire. Il recouvrit les racines du petit arbre, l’arrosa avec soin, et alla ranger sa pelle.
      Printemps, étés, automnes, hivers se succédèrent à nouveau. François avait désormais le dos vouté et passait le plus clair de son temps assis à la fenêtre, le sourire aux lèvres.
      Au jardin, le petit pommier était devenu un arbre splendide qui portait tant de fruits que François ne pouvait plus les manger tout seul.
      Et le vieil arbre était toujours là, lui aussi, tout contre lui.
      Soutenu par les branches vigoureuses de son jeune voisin, il vivait là des jours heureux, paisible et tranquille.

Chaque année, il voyait avec joie renaître quelques feuilles et des fleurs sur ses branches. Et il riait en secret quand un enfant, de temps à autre, volait aussi l’une de ses rares pommes qu’il lui restait.
      La plupart des gens, toujours pressés, passaient sans les voir. Mais parfois, quelqu’un s’arrêtait et les contemplait longuement, tous les deux.
      Un soir d’automne, le vieil arbre sentit soudain une main amie sur son écorce rugueuse.
      Le vieux François était venu le voir sans bruit.
      Tout bas, il lui parla.
      Alors, en silence, l’arbre inclina ses branches.
      Lui aussi l’avait senti : l’hiver approchait.
      Il était temps de se reposer.
      Tandis que les premiers flocons voltigeaient aux fenêtres et que François s’allongeait bien au chaud dans son lit, le vieil arbre s’assoupit au jardin.

    Et les deux amis s’endormirent en rêvant du printemps.
  
Bruno Hächler
L’ami pommier
Zurich, Nord-Sud, 1999