Il y a bien des siècles de cela, les habitants de le
région d'Arménie nommée Haïotz Tzor, tinrent conseil et décidèrent de bâtir un
Temple de la Lumière, afin de chasser à jamais du pays l'Obscurité, l'Ignorance
et la Pauvreté.
Laboureurs et semeurs, bergers et maçons, grands et
petits, tous se mirent à l'oeuvre. Ils travaillaient sans trêve, de l'aube
jusqu'au coucher du soleil, élevant les murs du Temple. Hélas ! Dès que tombait
la nuit, et que tout sombrait dans le noir, des mains inconnues détruisaient
tout ce qui avait été construit durant le jour. De sorte que, malgré tous les efforts des bâtisseurs, les murs ne
s'élevaient jamais plus haut que la surface de la terre.
Désemparés, ils ne savaient plus que faire pour
empêcher les forces obscures de poursuivre leur travail d'anéantissement. Un vieil érudit qui passait par cette
région, fut consulté afin de trouver remède à cette situation ; il prit sa tête
dans ses mains et réfléchit, réfléchit longuement - tant il est vrai que même
les plus savants doivent parfois réfléchir longtemps - puis dit :
- Cela ne peut être qu'une manoeuvre de l'Esprit
Noir - maudit soit son nom ! Il est partout, dans chaque lieu du monde, et toujours,
son seul but est de nuire aux hommes. Mais il est possible de neutraliser son
action néfaste. Prenez un flacon, remplissez-le de larmes maternelles, puis
posez-le dans les fondations de votre Temple. Votre travail avancera et le
Temple sera achevé.
Les bâtisseurs suivirent le conseil du vieux sage,
avec espoir.
Le remède sembla efficace car l'Esprit Noir ne se
manifesta plus de quelque temps.
Laboureurs et semeurs, bergers et maçons, grands et
petits, de l'aube jusqu'au coucher du soleil travaillèrent avec un entrain
retrouvé et un enthousiasme que rien n'aurait pu ébranler. Ils retrouvaient
chaque matin le fruit de leur travail intact, tel qu'ils l'avaient quitté la
veille ...
Mais hélas ! Leur joie fut de courte durée. Les murs
du Temple, à peine élevés d'un mètre au-dessus du niveau de la terre, furent à
nouveau détruits par les forces obscures.
Les villageois sombrèrent dans le désespoir, même
les plus optimistes !
Par bonheur, vint à passer un troubadour ; il avait
beaucoup voyagé, vu beaucoup de choses, connaissait le bien et le mal...
Il vit le désespoir du peuple, écouta le récit de
leur malheur, en ressentit beaucoup de tristesse, réfléchit un moment, puis
leur donna ce conseil :
- Les larmes maternelle, aussi lourdes de souffrance
soient-elles, ne suffisent pas. Prenez un flacon, remplissez-le de la sueur des
hommes, posez-le dans les fondations de votre Temple, auprès de celui contenant
les larmes. C'est ainsi seulement que vous pourrez déjouer les intentions
malfaisantes de l'Esprit Noir.
Les villageois suivirent le conseil du troubadour et
reprirent leur travail dans l'enthousiasme général.
Chaque matin, ils constataient avec une joie
renouvelée que les forces destructrices n'avaient point sévi au cours de la
nuit. Les murs du Temple de la Lumière s'élevaient, s'élevaient, au fur et à
mesure . Le bonheur régnait dans le coeur des bâtisseurs car ils étaient maître
de leur ouvrage, et qu'ils avaient mâté l'Esprit Noir - maudit soit son nom. Un
an s'était écoulé depuis sa dernière
manifestation.
Un matin pourtant, ils virent avec consternation
que, de nouveau, le Temple était détruit. Pas une pierre n'en subsistait ...
On peut imaginer le désespoir et le découragement
qui s'abattirent sur les villageois. Ils en vinrent à douter : peut-être était-il
inutile de s'acharner à bâtir ce Temple ? Dieu ne les en jugeait pas assez
dignes ? Ils se réunirent en conseil afin de décider de l'attitude qu'il leur
fallait adopter.
Les uns, les plus déterminés, proposèrent de
continuer coûte que coûte, tandis que d'autres, freinés par un profond
découragement, jugèrent inutile de s'obstiner dans une voie aussi décevante.
Les Sages eux-mêmes étaient perplexes : seule une intervention divine pourrait
les tirer d'un tel embarras.
Tout à leur réflexion, ils ne virent pas un
chevalier - sorti de nulle part - s'approcher d'eux. Ce dernier vit le
désespoir du peuple et s'enquit de ce qui leur causait tant d'alarmes. Il
écouta attentivement le récit qu'on lui fit des évènements qui semblaient
marqués du sceau de la fatalité.
C'est sans hésitation qu'il leur donna le conseil
suivant :
- Les larmes maternelles et la sueur des hommes sont
essentielles, mais ne suffisent pas : il faut une épée pour assurer votre
défense. Placez dans les fondations l'épée d'un brave. Et c'est ainsi qu'ils purent achever la
construction du Temple de la Lumière. L'Epée du Brave, puisant une force
toujours renouvelée dans les larmes maternelles et dans la sueur des hommes,
chassait les puissances obscures.
Depuis ce jour, le Temple de la Lumière s'élève,
indestructible, irradiant le pays de ses rayons vivifiants.
On raconte que les esprits destructeurs, terrifiés
par cette lumière indicible, se
transformèrent en corbeaux noirs et se perdirent à jamais dans de sombres
abîmes.
Quant à ceux qui n'avaient reculé
devant aucun sacrifice pour mener à bien l'Oeuvre de l'humanité qu'ils
s'étaient fixés, ils se transformèrent en oiseaux multicolores qui voltigèrent
dans les airs, autour du Temple, en chantant la victoire éternelle de la
Lumière sur le Néant ...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire