dimanche 19 avril 2015

Ne tuons pas la beauté du monde

Chaque fleur chaque arbre que l’on tue. Revient nous tuer à son tour. Notre jardin  c’est la Terre. Ce jardin, nous en prenons de plus en plus conscience, est menacé. Pourtant, nous sommes aussi de ce jardin. Avec les avancées de l’astronomie et de l’étude des origines de l’univers autant que celles des sciences de l’environnement, nous découvrons que tout est intimement lié. Il n’y a pas la nature, et puis nous, à part, dans notre bulle. Nous sommes aussi de la nature, en faisons partie au même titre que tous les êtres vivants. Le sort de chacun est intimement lié à celui des autres, et c’est cette prise de conscience qui émerge de nouveau actuellement. Une prise de conscience salutaire... Aussi, je crois que l’Église se doit de considérer de plus en plus la question écologique. Trop souvent, en Église, les considérations spirituelles ont été le prétexte pour éluder notre relation à la Création, pour fuir la réalité et notre condition terrestre. J’ai déjà entendu un chrétien dire : `` Pourquoi s’occuper de l’écologie, puisque ce qui est important, c’est notre salut spirituel. `` À mon avis, il s’agit là d’une profonde ignorance de la mission chrétienne qui ne consiste pas à s’éloigner des préoccupations terrestres, mais bien d’en tenir compte et de s’en sentir responsables puisque Dieu a bien voulu nous créer avec de la matière et nous faire cadeau de la Création! Teilhard de Chardin n’écrivait-il pas : `` Je vous salue, matière `` pour rendre compte de la dimension sacrée de la Création? Nous sommes créés à l’image de Dieu, et toute sa création est bonne, sainte et bénie. Comme chrétiens et chrétiennes, nous devons plus que jamais nous préoccuper du sort de la planète, don de Dieu à l’humanité, et dont il nous a fait les intendants ou les protecteurs. Nous faillons à notre mission si nous séparons l’esprit de la matière, l’âme du corps, la spiritualité de la nature. La Bible et le judaïsme ne font pas ces distinctions qui sont nourries par notre héritage philosophique grec.

 Nos traditions chrétiennes ont perdu avec le temps, qui plus est avec l’arrivée de Descartes et le développement du rationalisme occidental qui a éjecté l’homme de la nature, cette relation tout à fait saine à la Création. D’ailleurs, les orthodoxes, tout comme saint Thomas d’Aquin, ne disent-ils pas que la Nature est le premier livre de la révélation de Dieu, même avant la Bible! En ce sens, nous devrions redécouvrir les enseignements des saints comme saint François (auteur du Cantique des Créatures), saint Kevin d’Irlande (grand amant de la Nature), sainte Hildegarde de Bingen et Maître Eckhart (un dominicain). Rappelons aussi, ici au Québec, le travail du frère Marie Victorin, fondateur du Jardin botanique de Montréal. De même, avec ce souci écologique et de protection de l’environnement, nous pourrions revisiter avec fruit des textes bibliques comme la Création (`` Dieu vit que cela était bon `` : il a créé l’homme et l’animal le même jour), l’arche de Noé, le cantique de Daniel, Joseph en Égypte qui annonce des années de vaches maigres, plusieurs psaumes de louange à la Création et plusieurs paraboles de Jésus qui s’inspirent de la Nature, le texte `` Alors j’ai vu un ciel nouveau et une terre nouvelle `` (Ap 21, 1 : on n’y parle pas que du ciel, mais bien aussi de la Terre), le texte de l’Ascension dans Marc (16, 15), qui dit : `` Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création `` (et non seulement à toutes les nations!), etc. Ne tuons pas la beauté du monde
La dernière chance de la terre C’est maintenant qu’elle se joue.

Je crois qu’il est très important, comme chrétiens et chrétiennes, d’envisager ces questions essentielles, voire cruciales, et de se laisser ``convertir de nouveau `` par ce rapport oublié avec la Nature qui est au cœur de notre foi aussi. L’Église catholique a quelque chose à apprendre en questionnant cet éloignement qui s’est créé au fil des siècles, nourri par la dominance de la pensée occidentale rationnelle et technologique actuelle. Pour ma part, je donne de moins en moins mon aval aux Églises qui ne sont pas capables de considérer cet enjeu primordial de la protection de la planète. Il en va du sort de l’humanité! C’est trop important pour moi, et aussi pour ma génération de croyants et croyantes! Nous ne pouvons fuir notre Terre, et laisser les futures générations en plan : nous n’avons qu’une planète et c’est le cadeau que Dieu nous a fait pour vivre heureux et en santé et qu’il compte faire aussi aux autres générations à venir par nos bons soins.
Prendre soin de la Terre, c’est prendre soin de nous et considérer le trésor de vie que nous sommes, ce cadeau inestimable que Dieu nous a fait, qu’il continue de faire et qu’il fera encore. Nier ce rapport à la Nature, c’est nier ce don gratuit et merveilleux de Dieu. Le détruire, c’est faire affront à sa bonté et à sa générosité... C’est faire affront à ce que nous sommes – êtres vivants de la nature et de nature divine – et à l’avenir de l’humanité.

En conclusion, je cite cet extrait d’un article du journal Web Sentiersdefoi.info (vol. 5 no 11) qui traite du projet Église verte auquel des communautés chrétiennes adhèrent de plus en plus : `` Selon les auteurs du livre Pour une écologie chrétienne, (Jean et Hélène Bastaire, Cerf, 2004), il importe que les Églises s’inscrivent dans le courant écologique afin d’y apporter un éclairage différent. "Dans l’écologie chrétienne, souligne M.
Lévesque (le responsable du projet), l’accent est mis sur la transmission de ces valeurs aux générations à venir. Cette vision mène à l’espérance. Devant les enjeux énormes, il est facile de désespérer. Notre projet veut apporter une Bonne Nouvelle, non pas être alarmiste : l’environnement n’est pas que problèmes! Il ne s’agit pas de nier les enjeux, mais de changer notre relation à la nature, d’en redécouvrir l’importance et ainsi de développer tout le respect qu’on lui doit." `` Car Dieu s’y laisse aussi découvrir, comme lors du lever du soleil... Ne tuons pas la beauté du monde Faisons de la terre un grand jardin. Pour ceux qui viendront après nous

Ghislain Bédard

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